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- Culture
Ce film d’anticipation décrit un avenir pas si lointain, où les désirs sont soumis à la seule satisfaction consumériste. Avec Samantha Morton et Tom Cruise, envoûtants.
ParSamuel Blumenfeld
Temps de Lecture 2 min.

CINÉ+ PREMIER – JEUDI 11MAI À 20H50– FILM
Nous sommes en2054. Dans le cadre d’un programme expérimental cantonné au seul district de Washington, le ministère de la justice peut arrêter les criminels avant leur passage à l’acte. Des jumeaux et une jeune fille, Agatha, baptisés «précogs» en raison de leurs pouvoirs médiumniques, sont gavés de drogues synthétiques et isolés dans une piscine sous le regard de la brigade «précrime», qui guette leurs prédictions.
Le policier John Anderton (Tom Cruise) regarde et interprète sur un écran télépathique le film des crimes futurs, en serviteur zélé d’un pouvoir qui a réalisé l’impunité zéro. Sans se douter qu’il se verra plus tard sur ce même écran, en flagrant délit d’homicide.
A ce moment du film surgit une révélation qui n’a pas du tout la valeur explicative qu’on lui attache communément. On s’attend à ce qu’Agatha, la plus douée du trio de «précogs», révèle à John Anderton les raisons pour lesquelles un complot a été tissé autour de lui. Or, Agatha se met à avoir des ratés dans ses visions. Elle ne décrit plus un futur certain, mais un futur parallèle, et raconte à John Anderton le devenir possible de Sean, son fils, s’il n’avait pas disparu six ans auparavant.
Envoûtant Tom Cruise
On a alors le sentiment que le film recommence à l’identique. A la différence près que le lien qui unit les deux personnages – John Anderton a besoin d’Agatha pour expliquer pourquoi elle a deviné en lui un criminel – est maintenant devenu intime. Cette manière de refaire connaissance inquiète, à côté du plaisir que procure la maîtrise de Steven Spielberg et de l’interprétation envoûtante de Samantha Morton et de Tom Cruise. On pourrait croire que son film est un secret de famille qu’il consent à dévoiler. C’est tout simplement l’histoire bouleversante de deux individus qui n’arrivent pas à enterrer leurs morts.
Un «rapport minoritaire» concerne celui qui aurait pu avoir un avenir parallèle en ne commettant pas le crime dont il est virtuellement accusé. Ce concept d’uchronie est central dans la nouvelle Rapport minoritaire, de Philip K. Dick, publiée en1956 et adaptée par Spielberg. Le réalisateur américain confère à ce «rapport minoritaire» un sens supplémentaire, en désignant également celui qui n’a pas accompli son destin, à l’image du fils disparu de John Anderton.
Minority Report constitue la vision la plus plastiquement réussie au cinéma de notre futur depuis Metropolis, de Fritz Lang, et Blade Runner, de Ridley Scott. Dans ce futur où l’inconscient a été colonisé, nos désirs sont désormais soumis à la seule satisfaction consumériste. «Les morts ne meurent pas», explique Agatha à John Anderton…
Il y a quelque chose d’encore plus fou dans le projet de Spielberg: il vise à ancrer ses personnages dans la généalogie de leurs morts, comme si seule la mémoire d’un passé sans cesse entretenu offrait une alternative à un futur désincarné.
Minority Report, de Steven Spielberg. Avec Tom Cruise et Samantha Morton (EU, 2002, 145min). Ciné+ Premier
Samuel Blumenfeld
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